Les Labo’Mobiles désignent un dispositif de politiques publiques initié par le département de Gironde à travers sa Mission Agenda 21 et en lien avec LaBase. Ce dispositif est d’abord un instrument d’action publique destiné à enrichir la politique du département en matière de développement durable. Le dispositif s’appuie aussi sur une méthode basée sur le triptyque innovation publique, approche participative et démarche expérimentale.
Lancée en 2017 en Gironde, la première version des Labo’Mobiles se présente comme une offre d’animation territoriale dont l’objectif est l’émergence d’innovations sociales et écologiques. Elle visait à réunir des acteurs animés par une ambition commune et d’ampleur (“devenir un territoire zéro déchets”, “un territoire 100% alimentation bio et locale” etc.) et à définir avec eux leurs objectifs finaux ; à partir de cet horizon, il s’agissait alors de structurer les étapes de la démarche de transformation, à responsabiliser les parties prenantes sur l’effectivité de leur contribution, puis à mobiliser les ressources humaines, matérielles et financières nécessaires. Cette première édition a appuyé au total 9 projets, portés majoritairement par des collectivités territoriales sur près d’une année. Si le dispositif a permis d’organiser un cadre de débat et de projection autour des enjeux du développement durable, de fédérer des acteurs, il a aussi soulevé un certain nombre de questions quant à l’implication des acteurs territoriaux investis dans des projets d’innovation de rupture.
Un dispositif de politique publique pour favoriser les démarches de R&D sociale
La nouvelle version construite dès 2019 s’est donnée pour objectif de corriger les failles du programme initial tout en fixant un cadre qui maintiendrait le caractère radical et majeur des transformations envisagées. Ces éléments sont entrés en résonance avec les recherches menées par Ellyx sur le sujet de l’institutionnalisation de l’innovation sociale en France. La deuxième version des Labo’Mobiles propose ainsi des modifications importantes par rapport à la première notamment dans les règles de sélection des démarches et les modalités d’accompagnement.
Trois collectifs d’acteurs constituant les terrains d’application du dispositif sont sélectionnés. Ces trois collectifs portent une ambition de transformation radicale en matière de pratiques démocratiques, d’appréhension et de gestion de la fin de vie, de gestion circulaire et citoyenne des déchets organiques, ils sont composés d’acteurs divers (institutions publiques, structures de la société civile, entreprises privées). L’équipe Labo’Mobiles a eu une approche de soutien des dynamiques collectives d’acteurs, avec l’objectif de créer les conditions nécessaires à l’atteinte des ambitions projetées. La démarche s’étend sur 30 mois depuis la phase de sélection jusqu’aux enseignements (voir encadré).
Ces changements ont été motivés par la volonté de structurer des dynamiques d’acteurs engagés sur des expérimentations locales en lien avec des transformations de société effectives. La version augmentée a fait évoluer le profil des lauréats, issus de collectifs réunissant plusieurs personnes morales et ouverts aux acteurs privés, comme les entreprises commerciales ; les modalités de sélection avec la participation obligatoire à des journées de formation à la philosophie des Labo’mobiles ; enfin la formalisation des engagements sous la forme d’une charte.
Un dispositif de politique publique qui se construit autour de la R&D sociale
Le dispositif des Labo’Mobiles renvoie à un ensemble d’interrogations autour de la faisabilité, de l’effectivité et de l’impact des démarches de coopération qu’elle souhaite appuyer : comment la radicalité est-elle appréhendée par un collectif d’acteurs varié et appelé à évoluer ? Comment associer acteurs publics et privés dans une même dynamique de coopération en synchronisant les temporalités ? Comment organiser l’articulation des soutiens politiques et financiers ?
Dans le cadre des Labo’Mobiles, la réflexion scientifique ne porte pas seulement sur la constitution d’une nouvelle politique publique. Le dispositif Labo’Mobiles en tant que tel et les projets portés par les collectifs d’acteurs, se nourrissent et évoluent en synergie. L’innovation parcourt ainsi à la fois la collectivité territoriale qui porte les Labo’Mobiles, ici le département de Gironde, mais aussi et concrètement les collectifs mobilisés et leurs parties prenantes.
PAR SÉBASTIEN PALLUAULT, JADE OMER JULIE CHABAUD & JUSTINE BOSREDON
* Cet article est extrait d’une note de recherche du Laboratoire Commun DESTINS, un consortium de R&D regroupant des équipes de chercheur·euses et enseignant·tes-chercheur·euses coordonnées par la Maison des Sciences de l’Homme et de la Société de Poitiers (CNRS-Université de Poitiers) et des membres d’Ellyx.
